Vancouver, c'était le confort. Grâce à Julia, l'amie d'Emily, on n'a rien eu à faire. Arrivés le jeudi soir, elle nous a emmenés prendre un verre dans un super bar et nous a dit tout ce qu'il y avait à faire dans la ville. Le tour du parc Stanley dont les plages et les arbres centenaires (red woods) longent la côte en pleine ville; traverser le quartier "Main et Hasting", malheureusement connu pour sa population de drogués que la ville essaye de maintenir en vie avec des cliniques spécialisées et gratuites; aller magasiner sur Robston, les champs élysées de la ville pleine de gens riches et de touristes. On repart de chez elle avec toutes ces idées, propres comme des sous neufs après la douche, et avec, non pas une carte, mais deux cartes de la ville. Sans compter le conseil d'un de ses amis sur où stationner avec notre van pour ne pas avoir d'ennuis avec les autorités. Pour la première fois depuis le début du voyage, on s'est sentis presque chez nous, à tel point qu'on s'est demandé si on ne resterait pas, ou plutôt si on ne reviendrait pas habiter ici. Trois jours de balade ont mis fin à cette idée. La montagne et la plage accessibles en transport en commun ont beau faire de la ville un lieu pas comme les autres pour les amoureux de la nature, le vieux cinéma où l'on a vu un film a beau avoir du cachet, Julia a eu beau nous emmener à un party plein de jeunes, il y a ce "petit quelque chose" chose à Montréal qu'on ne retrouve pas ici - les Québécois, peut-être? On quitte en tous cas la ville sans regret le dimanche 25 au matin (sauf d'avoir raté Clément qui est parti le même jour que nous!); on reprend la route en direction des États-Unis, avec une seule crainte: passer la frontière; surtout après les aventures du début de notre voyage....
Ultime pied de nez du "destin", s'il en est, ma plus grande crainte depuis le début du voyage s'avère pourtant être (heureusement!) totalement infondée - pour cette fois. Malgré deux ou trois heures d'attente dans la voiture en plein soleil (quelle idée, aussi, de passer la frontière juste au Sud de Vancouver, un dimanche, en plein été...) à écouter un audio book pour se destresser(superbe invention), contrairement à toutes nos attentes, une fois arrivés devant le douanier, nous passons la frontière en... 5mn. Une seule question, "où allez-vous", une seule réponse "chez un ami à Portland". On lui donne l'adresse de Ron et Jayne, puis il nous rend nos passeports... Il ne nous demande ni où nous habitons, ni combien de temps nous resterons aux USA. Et on reprend la route, comme si de rien n'était! Il nous faudra quelques heures pour le réaliser: nous sommes aux États-Unis, nous pourrons être au mariage de Tom et Rachel dans les temps, visiter le Grand Canyon.... L'aventure continue.
Mais avant tout, stop à Portland. D'une nuit prévue, nous resterons finalement trois nuits. Que dire de plus que le plaisir de voir Ron et Jayne aura foi de notre motivation à repartir? Ils nous logent chez eux, nous concoctent des petits plats meilleurs les uns que les autres, nous emmènent faire le tour de la ville en voiture, nous présentent Kim, une de leurs anciennes étudiantes, qui nous fera faire le tour de la ville en vélo. Le reste du temps se passe doucement en conversations hautement politiques et subversives autour de repas infinis et tellement agréables. Quant à la ville elle même, Portland nous paraît calme après Vancouver: moins peuplée, plus âgée. Plus intellectuelle aussi. Le plus grand magasin de livres des USA, Powells, me fait penser à Gibert Jeune à Paris ou encore à un Renault Bray immense où l'on venderait aussi des livres d'occasion. Il s'étend sur un bloc entier, on aurait presque besoin d'une carte pour ne pas s'y perdre! Malgrès tout, la population semble très policée et un peu raciste; on aurait peut-être préféré Seattle, mais le temps nous aura manqué pour y voir autre chose que Pike Place, l'extraordinaire marché qui s'étend le long de la côte. Parlant de temps, la route finit d'ailleurs par nous appeler aussi à Portland. Déjà il nous faut repartir et quitter nos amis... Non sans une foule de conseils sur la route à prendre vers le Sud: la 101 puis la 1, direction San Francisco en longeant l'Océan tout du long. Ron dit que c'est "la plus belle route des États-Unis"; après quatre jours de route, nous avons en effet aujourd'hui le souffle coupé. Par la beauté des paysages, par les surprises de la route....
Juste après "Strawberry Hill" où nous apercevons quelques lions de mer avachis sur leurs roches, symboles apeurant de certains Américains sans force et sans motivation, nous aurons notre plus grosse surprise à date: une rencontre. Ils s'appelaient Chriss et Sarah. Ils avaient environ 21 et 25 ans. Ils étaient sur la route quand on les a pris en stop à Florence, Oregon, là où Ron et Jayne ont vécu pendant 23 ans. Aux États-Unis, dans la plupart des États, c'est illégal de faire du stop. De prendre des auto-stoppers aussi. Et pourtant on ne regrette pas les deux jours passés avec eux avant de se quitter hier soir.
On se croyait "sur la route" mais avec eux, on a découvert notre chance et notre confort. Pas de van pour eux; pas de vêtements de rechange non plus. Pas de vélos. Juste leurs pieds, un sac à dos chacun, une casserole, un réchaud, un livre sur les plantes, des huiles essentielles faites maison pour se soigner et des étincelles dans les yeux. Lui n'a pas de carte d'identité et n'est pas revenu chez sa mère, à Boston, depuis plusieurs années. Elle n'est pas "vraiment" sur la route mais semble être tombée amoureuse de ce vagabon qui vit hors du système. Petit à petit, au long de ces deux journées, sur la côte menant de Florence à Arcata - la ville des voyageurs, où nous sommes en ce moment - ils nous expliquent un peu leur vie. Leur volonté de vivre libre. Leur point de vue - qui ressemble tellement au nôtre et à celui de Ron et Jayne! - sur leurs concitoyens qui vivent dans l'ignorance, l'opulence, l'obésité et le confort matériel. Hier, alors que nous nous arrêtons au milieu de la forêt des redwoods millénaires et que nous nous préparons à manger sous la canopé dans une ambiance féérique et silencieuse au milieu d'un nuage, Chriss nous parle du "manque de lien". "Ici, dit-il, les gens vont acheter des moules au marché du coin quand ils pourraient en ramasser sur la plage. Ils ne savent pas ce qu'il y a dans la nature, ils sont complètement déconnectés". Et lui et sa chère Sarah, qui après tout ne font que chercher à vivre dans la nature le plus simplement possible, se retrouvent étiquetés par la police comme des "menaces". Il est illégal d'être sans abri aux États-Unis. Et de marcher sur le bord de la route avec un sac à dos. Si vous voulez marcher, il faut suivre les sentiers balisés dans les parcs nationaux dont l'entrée est payante. La Californie est toutefois plus accueillante que l'Oregon en la matière (et l'Oregon plus accueillant que bien des États partout dans le pays!). Ici, on peut faire du feu sur la plage. Ce qu'on prend plaisir à faire tout les quatre, et à partager notre repas. Ils nous apprenent des choses, on leur en apprend. Eux sur le système social aux USA, sur ce qu'il faut voir sur la route, sur les plantes et les gens. Nous sur l'Europe et sur le Canada, sur la musique française et québécoise, et sur les moules aussi, car avant nous, eux-même ne savaient pas qu'elles étaient comestibles...
Les images de la côte, des dunes, de la plage et des arbres dont la taille dépasse le sens commun resteront dans nos esprit associées à leurs sourires, à leur pas lent, à leur excitation en trouvant une fleur rare, à leur sens inné de la vie tel qu'on ne le voit que si rarement, en particulier dans cette partie du monde.
Ce matin retour au confort, lessive, Internet, café, magasinage de nourriture. Bientôt nous arriverons à San Francisco....
samedi 31 juillet 2010
Le confort et "la route" - Oregon et Californie
vendredi 23 juillet 2010
Vancouver
"Et en suivant la voie ferrée, ils finirent par arriver à l'Ouest"; ça pourrait finir ou commencer comme ça, et ça pourrait être un roman.
Si c'était à pied ou à cheval, ce serait autour de 1850, pendant la ruée vers l'or. Nous nous installerions, avides de pépites, quelque part autour de "Hope", petite ville à l'Ouest des Rocheuses initialement habitée par des Améridiens, petit bijou encastré dans les montagnes, sur la rivière, à deux heures à l'Est de l'actuelle ville de Vancouver. Rendez-vous aujourd'hui des back-packers en tout genre, qui profitent de la pause du bus Greyhound pour faire leur lessive, aller sur Internet ou magasiner quelques souvenirs dans les magasins de perles, chez le sculpteur de bois du coin ou chez les marchands de cartes postales.
Si c'était en train, ça serait quelque part autour de 1885, à la date où la Colombie Britannique, à l'Ouest du pays, a rejoint le reste de la Confédération Canadienne grâce à la finalisation de la voie ferrée du "Canadien Pacifique". "Sans train, pas de confédération", auraient dit les responsables de BC. Qu'à cela ne tienne, les hommes ont traversé, en cinq ans seulement, l'immensité, l'altitude, les roches, les avalanches et les animaux sauvages des Rocheuses, qui culminent à quelques 4000 mètres d'altitude entre Calgary et Vancouver. À coups de pioches et de piolets, en construisant 300m par jour, dans des camps temporaires le long de la voie. Si c'était en 1885, nous aurions voyagé sous l'incitation du gouvernement et de la compagnie de chemin de fer, qui nous auraient proposé d'acheter des terres cultivables en Alberta ou de nous installer près de la côte pour commencer une nouvelle vie. Ce serait au détriment des Améridiens chassés de leur terre, mais aussi des milliers de Chinois morts de maladie, de malnutrition et d'accidents en construisant la voie ferrée, main d'oeuvre bon marché traitée comme des sous-hommes dans un Canada qui croyait encore au concept de "race". Plus de train aujourd'hui, ou presque, sauf pour les marchandises... Les voitures ont enfoui sous les branchages les restes de cet exploit historique du chemin de fer canadien, dont restent surtout quelques souvenirs, exposés au musée de Revelstoke, qu'il ne faut manquer sous aucun pretexte, dans cette petite ville de montagne à la sortie des Rocheuses en allant vers Vancouver par la 1.
En voiture, ça pourrait être dès 1954. C'est à cette période que Hope a été rejoint par l'autoroute. Les camions de marchandises ont commencé à compléter les trains, qui jusque là étaient les seuls à transporter nourriture, bois, et toute autre marchandise, d'un bout à l'autre du pays. La route 1 est maintenant parsemée de centaines et de centaines de camions qui n'en finissent pas; des camions à double, tripple ou quadruple chargement; des camions qui roulent pour la plupart aussi vite que les voitures (120km /h en moyenne quand la limite est à 100) dans des montées et des descentes vertigineuses à plus de 40% de dénivelée. Ici, on ne freine pas, sous peine de se faire rentrer dedans par derrière! On apprend à gérer le poids de son véhicule et à prendre les virages sans chavirer sur le côté (ce qui arrive quand même parfois, preuve hier un camion entièrement retourné sur le toît!); on se croierait dans Mario Kart... En plus dangereux....
En van, comme on fait, ça ressemblerait presque aux années 1960-70. L'époque des Hippies, des gens qui traversent tout le continent en nomades juste pour "voir ce que ça fait". À Hope, hier, rencontre justement avec Betty (sans rire, elle avait le même nom que notre van!), une commercante qui se rappelle cette époque avec nostalgie. Les cheveux longs, les Beattles, les drapeaux multicolores. Et l'insouciance, l'impression que tout est possible, la liberté. Quant à elle, elle dit qu'elle ne le ferait plus. Que l'époque a changé, que c'est devenu plus dangereux. Peut-être... Mais peut-être pas. Après tout c'est cette même liberté à laquelle nous gouttons aujourd'hui pendant ce voyage à travers l'Amérique du Nord. Celle de décider au dernier instant où nous allons dormir, de se demander le matin ce que nous ferons pendant la journée. Plus on avance vers l'Ouest, plus on croise d'autres "post-hippies" comme nous sur la route. Hier, dans les embouteillages de la banlieue de Vancouver, un van avec quatre gars autour de la trentaine, moustaches de Beattles et cigarettes au bec. Un peu plus loin, deux jeunes dans une voiture venant de l'Ontario traînent un U-Haul. Lui a les cheveux longs, elle des dreadlocks et les pieds nus sur le pare-brise en avant.
Quoi de différent entre les hippies des années 1960-70 et les back-packers d'aujourd'hui? Le nombre, sans doute. De notre côté de la route, nous n'avons pas rencontré un seul auto-stopper sur les 5 000 km de la traversée. De l'autre côté, nous en avons vu moins de dix. Les vans, nous ne les voyons que depuis quelques centaines de km. Et puis surtout... Ceux que nous voyons pour la plupart sont extrèmement (trop) bien équipés! Le confort de 2010, avec ses Tim Horton (encore!!) à tous les coins de rue qui tolèrent la présence de véhicules sur leur stationnement pendant la nuit, enlève un peu du charme des voyages des premiers pionniers et de leurs successeurs. En cherchant bien, ceci dit, on trouve des traces ça et là de cette histoire qui devient presque légende. Qui dit que l'Amérique du Nord n'a pas d'histoire? Récente, certes, l'histoire de ce continent et celle de ce pays est pourtant bien réelle, mélant, comme pour nous autres Européens, les moments de fierté et de gloire, à des histoires d'extermination, de maltraitance ou de déportation...
L'histoire s'efface, donc, petit à petit, sous les chaines de Tim Horton, les stations essence, les nouveaux building qui remplacent les anciens (pas de loi d'urbanisme ici!). Mais ce qui reste vaut tout les détours. Des paysages à l'infini qui coupent le souffle toutes les centaines de km, des animaux sauvages tels qu'on n'en rêverait même pas en Europe, proches, si proches des hommes. Voilà tout le paradoxe du confort moderne: il donne plus de place et de puissance à la nature. Les hommes s'enferment eux mêmes dans leurs condos ou leurs motels, se désintéressent des grands espaces, et laissent ainsi aux plantes le temps de repousser, aux animaux le temps de repeupler. Dans les plaines qui s'étendent sans fin de Winnipeg à Calgary autour de la ligne droite de la route 1, des milliers et des milliers de chiens de prairie sautillent au bord de la route. À peine sortis de l'autoroute pour s'engager dans l'un des rares sentiers non gondronnés qui la bordent, on aperçoit les petites bêtes qui se jettent presque sous les roues du véhicule tellement elles ont l'habitude d'être seules et ne prennent pas conscience du danger. Sur la même route, un groupe de cerfs de virginie et de biches sont à quelques mètres d'une route secondaire, près de l'entrée d'un camping. Partout des papillons, qu'on ne voit presque plus en Europe, et des papillons de nuit dont certains, blancs, sont magnifiques. En voiture, nous pleurons presque devant les centaines de libbellules qui viennent s'écraser sur notre pare-brise à 120km /h. Nous pleurons moins, par contre, sur les moustiques, qui maculent bientôt l'avant de la van et le pare-brise d'une fine couche noiratre. On prend l'habitude de s'arrêter vers 17h pour souper, puis de remonter en voiture juste avant la nuit, de rouler encore quelques centaines de km pour trouver un coin ou dormir, mais cette fois sans plus ouvrir aucune fenêtre.
Après les plaines, c'est l'arrivée dans les Rocheuses. À Calgary, à la sortie de la ville, elles se dessinent au loin, immenses, à gauche et à droite, sur toute la ligne de l'horizon, aussi loin que les yeux puissent voir. Nous sommes dans l'orage, mais là bas il fait beau, au dessus des nuages. À 50 ou 100km devant nous, on voit le soleil qui perce dans les nuages et qui éclairent les monts enneigés. On nous avait dit que ça coupait le souffle; c'est le mot. Puis c'est la montée. L'étonnante autoroute qui traversent les montagnes sur 6 voies. Les arbres et les roches défoncées par la dynamite. Les éternels travaux pour agrandir et entrenir la "transcanadienne". Et les touristes, partout. Jusqu'au lac Louise, haut lieu touristique depuis l'arrivée du train dans la région, on voit des cars de toutes les nationalités du monde. Et pourtant... Pourtant... La nature, encore une fois, prend le dessus. À l'arrivée, devant le lac vert turquoise à 1500m d'altitude, averse de grèle, pendant que nous marchons. Et puis surtout, des panneaux partout: attention aux Grizzlis. C'est l'endroit du monde ou la densité de Grizzlis et d'hommes dans un même endroit est la plus élevée. Nico n'y croit pas trop, ou du moins n'a pas peur. Quant à moi je sors ma clochette à ours et je fais du bruit, autant que possible, comme conseillé. Les barrières électrifiées du camping n'ont rien fait pour me rassurer, encore moins que les dépliants donnant des conseils en cas de rencontres avec un ours. Déterminer si l'attaque est défensive ou prédatrice (ok, mais c'est pas évident à savoir!). Si elle est défensive, faites le mort. Si elle dure plus de 2mn, elle est sans doute prédatrice, alors battez vous! Contre un ours de plusieurs centaines de kg, ça promet...
Et finalement, nous verrons notre ours... Nico en rêvait, je le redoutais. Nous avons tous les deux eu de la chance. La chance de rencontrer deux Québécois, Cindy et Martin, avec qui nous prenons le sentier du lac Morraine devant les panneaux "il est recommandé de marcher en groupe de quatre personnes" (à cause des ours, oui oui...). La chance que nous nous entendions tellement bien que nous ferons toute la marche ensemble, pendant presque 3h. Et la chance que Martin ait de tellement bons yeux et passe tellement de temps à scruter les montagnes à la recherche des chèvres sauvages qu'il voit, sur le versant de l'autre côté de la vallée, une maman grizzli et ses deux petits, à moins d'un km de distance, mais assez loin tout de même pour ne pas être une menace immédiate. Voilà qui risque de ne pas nous arriver tous les jours.... On se quitte après un café, forts de cette expérience commune, munis de belles photos qu'on s'enverra par emails, et affublée quant à moi de l'habituel surnom de "fée clochette" qui cette fois me va plutôt bien vu la clochette que j'ai au bout de mon bras pendant toute la balade!
Après ça, c'est la lente descente vers Vancouver. Après le rush du début du voyage et les 5 000km de route en 8 jours, on a enfin l'impression de prendre notre temps, d'être en vacances. De faire des rencontres. Betty, dont je parlais plus haut, nous vend la mascotte qui nous manquait pour notre van: une Betty Boop - Hippy de 5cm en plastique que nous accrochons au rétroviseur. Peet, le sculpteur de bois, nous montre ses créations dans les poussières de bois et la fumée de cigarette de son établi à l'abri des montagnes. Puis, à Vancouver, Julia, l'amie d'Emily, nous accueille, nous offre sa douche (youpi!), et nous emmène dans un bon bar boire de la bonne bière. On remet ça ce soir après la plage et le centre ville ! Prochaine destination samedi ou dimanche, Portland, pour voir Ron et Jayne F. Puis la Californie, le mariage, les amis de Nico, quelques Grinders sans doute, les enfants de Wellyn, et encore la nature, la plage, la traversée des Rocheuses dans l'autre sens, le Grand Canyon.... À suivre....
samedi 17 juillet 2010
Winnipeg !
Je vous vois déjà penser: "Winnipeg, Winnipeg, mais... Ce n'est pas aux États-Unis, ça!" Et vous avez bien raison... Nous sommes encore au Canada!
Tout avait pourtant commencé comme prévu... Passage par Chateaugay le 5 juillet au soir, à l'Héritage St Bernard - 1h de Montréal. Nous rencontrons mon amie Pascale, elle nous fais visiter "son" parc, magnifique, sauvage, étonnant. Un bijou de nature à quelques km de la ville. Le lendemain matin, après une nuit à nous battre contre les vampires (comprenez les centaines de moustiques qui nous assayaient car nous dormions près d'un marrais) et quelques tâches de sang sur une moustiquaire installée à la hâte pendant la nuit, nous avons droit à un super petit déjeuner, à une balade au milieu des hérons et des grenouilles, et même à un cours sur les instectes par "monsieur bibittes" (ok, il ne voulait pas qu'on l'appelle comme ça...); saviez-vous que les insectes respirent par le ventre? (par les stigmates sur le ventre en fait.
Bref, un bon début. C'est donc le coeur léger qu'on continue notre route, jusqu'à Sherbrooke. Évidemment, nous arrivons avec une demie journée de retard et Isabel commence à sérieusement s'inquiéter. Mais qu'à cela ne tienne, quand nous sommes finalement sur place et après quelques tergiversations, nous décidons tous ensemble que ce serait sympa que nous restions quelques jours... Sans savoir jusque quand cela va nous mener! Premiers jours bricolage: Sebastien, le frère d'Isa, nous aide à réparer les petits problèmes sur le van, nous prête des outils, nous indique comment aller jusqu'au Canadian Tire. Réparation du feu arrière, installation du porte vélo, mise en place de moustiquaires (pas si efficaces contre les moustiques d'ici, on le découvrira à regret quelques jours plus tard, couverts de dizaines et de dizaines de piqure....). Puis Manu, la soeur d'Isa, nous aide à faire des rideaux... Indispensables pour dormir dans notre van sans se faire voir de l'extérieur, sans se faire déranger par la lumière, et pour se changer quand on n'a nulle part d'autre où le faire! Avec les restes de tissu des coussins que j'avais fait en 2007 (!) nous voilà donc bien munis!
Entre les travaux, c'est la belle vie. On essaie le réchaud offert par J. de JS et qui fonctionne à merveille (merci!), on se baigne et on "fait des vagues" dans l'énorme piscine gonflable, on parle avec la maman d'Isabel qui nous accueille si bien, et surtout, surtout... On joue aux aventuriers du rail!!! Des vrais vacances, tellement qu'on n'a presque plus envie de partir... "Restez jusque vendredi, je vais chercher mon chum Florian aux États-Unis, on fera la route ensemble", nous dit Isabel. Soit, faisons, ça nous laisse le temps de faire des crèpes! Et de marrier "Betty", notre van, avec Victor, la voiture d'Isabel.
Le 9 juillet, finalement, nous voilà à reprendre la route; ou du moins c'est ce qu'on se dit! Isabel part tôt le matin jusqu'à Standstead, la petite ville frontière où elle travaille au musée Corby Curtis. En début d'après midi, on la rejoint. Sandwitch dans le parc, visite du musée par notre "guide personnelle" (merci!), visite de la bibliothèque... Cette ville frontière nous laisse un goût étrange, vestige d'un temps où les frontières avec les USA étaient bien plus poreuses. La bibliothèque, fondée en 1911 par une famille du coin, est à cheval (volontairement) sur les deux pays. Nous traversons la frontière à pied, sans poste frontière, sans passeport et sans douanier pour aller jusqu'à la porte d'entrée... En toute légalité. Du moment que nous retournons sur nos pas quand nous sortons de la bibliothèque sous les yeux inquisiteurs des caméras de surveillance, pas de problème!
Nous voilà prêts. À 17h15, Isabel nous rejoint après son travail et nous mangeons tous les restes de nourriture que nous avons dans notre van avant de passer la frontière. Précaution inutile puisque finalement le douanier ne prend pas la peine d'ouvrir la porte du van. Nous sommes dans un petit village, tout est beaucoup moins strict... Sauf que... Et oui, il y a un "sauf que". En regardant nos passeport, le douanier découvre un papier vert (l'exemption de visa) édité au mois d'avril lorsque nous avons passé la frontière et fait éditer nos permis de travail actuels. Petite explication de la loi américaine: notre exemption de visa a été éditée pour 3 mois. Elle est donc valable jusqu'au 17 juillet. Or nous sommes le 9 juillet. Nous avons donc le droit de passer la frontière américaine mais uniquement si nous ressortons du pays avant le 17 juillet. Non, ce n'est pas possible d'éditer une nouvelle exemption de visa avant l'expiration de l'ancienne. Et si nous restons aux USA alors que nous ne devrions pas, nous n'aurons plus jamais le droit dans notre vie de passer la frontière sans visa.... Nous devrons faire une demande systématique aux autorités pour n'importe quel voyage. Pas une bonne idée. Par contre, il est possible que nous sortions du territoire avant la fin de l'exemption de visa actuelle et que re-rentrions dans le pays après cette date. Pratique, quoi. Petit récap de la situation: nous devons être en Californie pour le mariage de mon frère Tom et de sa femme Rachel début août. Impossible de repasser la frontière le 17 ou l8 juillet si nous passons par les États-Unis. Tour des possibilités: 1. Sortir du pays au Mexique. Short en temps et risqué: la frontière sera difficile à passer entre le Mexique et les USA et si nous sommes coincés là bas nous aurons l'air fin, comme on dit. 2. Aller jusqu'à New York puis bifurquer vers l'ouest pour repasser la frontière. Dans ce cas là, on ne va pas en Caroline du Nord, ni à Toronto. Reste la 3ème possibilités pour essayer de voir tout ce que nous avions prévu de voir: rebrousser chemin et faire le voyage en sens inverse.
Après un moment de réflexion, notre décision est prise. Nous irons chercher Florian en New Hampshire avec Isabel puis rentrerons le soir même avec elle, pour partir ensuite vers l'Ouest... Sans compter un stop à Sherbrooke (à St Elie d'Orford en fait!) à nouveau, pour faire du GN pour Nico (avec Sébastien le grand maître!), de la piscine pour moi, puis de l'acrobranche le dimanche, parce que tant qu'à être là un jour de plus, autant en profiter et découvrir enfin cette activité que j'ai toujours rêvé de faire, à travers les branches et les roches des cantons de l'est...
Et voilà comment nous sommes finalement partis "pour de vrai" le dimanche 10 juillet au soir et comment nous nous trouvons en ce moment à Winnipeg, le "coeur du continent". Nuits dans la van, journées sur la route, bain dans les milliers de lacs de la région, cafés dans les Tim Horton, repas sur notre réchaud... L'aventure s'avère étonnante et magnifique à la fois. Les routes de l'Ontario, longeant les lacs et montant et descendant les falaises escarpées et venteuses, ont fait place hier à la route 1, droite à l'infini, au milieu des plaines couvertes de champs cultivées. Moins de chance ici, comme c'était le cas sur la route pendant ces 4 derniers jours, de croiser des orignaux, des cerfs de virginie ou des ours. De ces derniers nous n'en aurons finalement vu qu'un, de quelques semaines ou quelques mois, mort frappé par une voiture sur la route menant de White River à Kenora. Les cerfs de virginie se montrent un peu plus et nous avons aussi eu la chance de croiser un castor lors d'une douche matinale près d'un lac, ainsi que des furets hier (Ben, nous avons bien pensé à toi!).
L'aventure nous apprend aussi la gestion du temps, de la fatigue, de la nourriture (sans frigo et sous la chaleur!) et de l'eau. Saviez vous qu'on peut prendre une douche avec un bidon de 4 litres? Nos salles de bain varient, devant des chutes d'eau vertigineuses, près d'un lac ou encore dans les toilettes du Tim Horton... Moins glamour mais en ville on peut difficilement faire mieux! Nos salles à manger ne sont pas mal non plus: devant un lac la plupart du temps, où nous pouvons aussi tremper nos ustensiles dans l'eau après le repas (sans produit, vive le bio!). Les bons petits plats se succèdent malgrè le manque de moyens. Avec un rond (une plaque), une poele, deux casseroles, deux gamelles et deux topperwares, nous sommes capables de nous faire des platrés de pates sauce champignon-tomate, du riz, des sandwitchs - pas pire!
10h15 déjà, la route nous attend. Encore 4000km à faire jusque Vancouver, à croiser sans aucun doute encore de très nombreux cyclistes qui font la route de façon bien plus courageuse que nous. Autant dire que leur équipement est plus restreint que le notre... Mais sans doute sont-ils aussi moins autonomes, devant s'arrêter dans des cafés et des hôtels. Quant à nous, nous allons continuer notre vie de nomade, et nous demander encore, sans doute, demain matin, au réveil... "Criss, mais ch'ui où?".
D'autres nouvelles bientôt... Si notre accès internet nous le permet.... C'est la première fois en une semaine que nous trouvons de quoi nous connecter! (C'était plus facile en Inde, lol...).